Groupe Correspondance

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A VIVRE ET l’ECRIRE

En 1975, une équipe d’animateurs, qui fonderont en 1983 Vivre et l’Ecrire, propose, à l’occasion de la sortie des premiers livres issus de l’expérience d’animation d’écriture (Copies d’amour sur tableau noir, Le Bourdon et le Cafard…), une correspondance entre adolescents et adultes, libre et personnelle.

Ainsi, les ados peuvent se confier en toute liberté à un correspondant adulte, toujours le même : c’est comme un journal intime qui répond.

Pour répondre à une demande croissante non seulement en France mais également à l’étranger et pas seulement dans les pays francophones, une équipe a dû être constituée. Cette correspondance s’appuie sur un réseau d’adultes fidèle et renouvelé, d’autant plus que le besoin de se confier est loin d’avoir disparu.

LIVRES édités autour de la correspondance :

* Mon coeur s’est suicidé : journal et correspondance de Gaëlle sur la drogue.

* Grand-mère, je t’aime : lettres de jeunes à leurs grands-parents.

* 100 lettres d’adolescents : exemples de lettres envoyées par les ados.

* Reste encore un peu, j’ai pas fini de grandir : Catherine Albert.

* Que reste-t-il quand il ne reste rien : Catherine Albert.

* Réponds-moi vite ! : les 1ères lettres d’ados à Vivre et l’Ecrire.

* Nous allons sauter les barrières : lettres de jeunes d’Algérie.

* Histoire d’une Correspondance : Sylviane Patron et Pierre de Givenchy

* Je ne savais pas ce qui allait se passer après : Claire Agnès

TEMOIGNAGE SUR LA CORRESPONDANCE

Mon aventure avec la correspondance a commencé à l’âge de 14-15 ans avec ma la sortie du livre « Le bourdon et le cafard », 1er livre édité par Vivre et l’Ecrire (qui n’était pas encore une association en 1975). Je me suis retrouvée dans ce qu’écrivaient les jeunes. Une proposition m’était faite d’écrire à un adulte qui me répondrait « il s’appelait Marie-Claude et Benoît). Cet adulte est là aujourd’hui puisque c’était Pierre de Givenchy avec qui je corresponds toujours de temps en temps, depuis maintenant 33 ans.

Cette correspondance était pour moi un peu comme un journal intime qui répond. Mais c’était plus que cela. A chaque lettre de ma part, à chaque question que je posais. Je recevais en réponse une nouvelle question. Ceci m’énervait souvent car j’avais l’impression de ne pas avoir de réponse précise à ma question. Mais aujourd’hui, je sais que c’est ce qui m’a permis d’aller plus loin dans mon questionnement sur la vie, mes doutes, mes cris de détresse. De grandir tout simplement.

Les questions et les thèmes que j’abordais dans mes lettres rejoignent ceux des jeunes d’aujourd’hui, les questions existentielles que l’on se pose à l’adolescence :

Les problèmes avec les parents, les mésententes avec les frères et sœurs.

Les ami(ies) que l’on n’a pas ou qui nous trahissent, que l’on aimerait avoir.

Les déboires amoureux et qui font tant souffrir.

Les changements de son corps que l’on accepte pas. Se voir grandir, changer et ne pas se reconnaître dans le miroir. Se trouver moche, trop grosse ou trop maigre.

Les questions sur la vie, sur la mort, sur l’au-delà.

Avoir le cafard sans savoir pourquoi ? Avoir envie de mourir, de tout quitter, de fuir, de partir. Et j’en oublie sans doute….

A travers tout cela c’est finalement se chercher, chercher son identité, car c’est bien de cela qu’il s’agit.

L’importance dans cette correspondance c’est de pouvoir le dire, l’écrire, le crier avec les mots de sa souffrance, de ses 15 ans. Et cette correspondance, par le fait que quelqu’un vous répond permet de canaliser et d’éviter des débordements qui pourraient être parfois destructeurs voire suicidaires.

C’est aussi l’attente de la réponse qui est important dans cette correspondance. Je me souviens avoir attendu les lettres avec impatience et le délai était toujours trop long. Cette attente, cette mise à distance permet aussi de prendre du recul

face à ses questionnements et ses interrogations et parfois de trouver la réponse avant la prochaine lettre.

Le fait de correspondre avec un adulte a un côté rassurant pour le jeune, plus que dans une correspondance avec un autre jeune qui se pose les mêmes questions, a les mêmes doutes et les mêmes craintes. C’est un adulte, à priori quelqu’un qui sait, qui a la connaissance et le savoir.

Et d’autre part c’est un adulte que l’on ne connaît pas. On peut tout lui dire, même ce qu’on a de plus intime en soi. Ce qu’on oserait dire, ni à ses parents ni même à son ou sa meilleure amie. A lui on peut le dire. Là encore il s’agit de la distance et de la confiance nécessaire entre le correspondant adulte et le jeune. La question du non jugement est indispensable dans ce type de relation.

Et c’est bien comme cela que j’ai vécu cette correspondance, cette relation, dans une confiance totale.

Aujourd’hui je pourrais dire que le correspondant adulte qui est derrière toute correspondance est un peu comme un « tuteur ». Un tuteur, parce qu’à l’adolescence on est un peu comme une fleur qui n’arrive pas bien à pousser avec le vent, la pluie, la grêle, avec ses racines qui poussent de travers et n’arrivent pas à s’enfoncer dans le sol pour y puiser les ressources et la nourriture nécessaires à sa propre vie.

A travers la correspondance, c’est ce correspondant adulte qui est présent, toujours là, qui est prêt à tendre la main à n’importe quel moment ; qui accompagne tout au long du chemin, qui aide à redresser la barre.

Comme le tuteur que l’on plante à côté de la fleur, il ne prend pas sa place, il est là en soutien, il lui permet de pousser, à peu près droit, de grandir à la lumière du soleil au lieu de se recroqueviller et de faner.

L’intervention d’aujourd’hui autour de la correspondance est je crois : la correspondance, une relation avec l’écriture. Comme je viens de le dire, C’était d’abord pour moi, une relation entre deux personnes avec l’écriture comme fil conducteur.

Aujourd’hui, je découvre enfin une relation avec l’écriture. J’écris pour mon plaisir, je cherche les mots pour dire telle ou telle chose, pour transmettre, pour raconter. Je vis pleinement cette relation. Je la choisie comme amie.

Lorsque j’avais 15 ans, je n’ai jamais eu cette sensation. L’écriture était pour moi comme un « déversoir, un sas » dans lequel je mettais le trop plein. Et j’insiste bien sur le fait de l’importance de cette correspondance car ce « déversoir » ne reste pas là sans écho, sans résonance, sans réponse, elle permet de canaliser ce trop plein.

J’ai écris, correspondu très régulièrement pendant environ 5 ans puis plus occasionnellement aux grandes périodes de ma vie, mariage, naissance de mes enfants, décès de mon père. Aujourd’hui encore je confie à celui que j’ai surnommé « mon grand frère de cœur » certains moments importants de ma vie. Et je l’en remercie.

Sylviane Patron pour le Salon du Livre écrit par les Jeunes à Orléans en 2008